ECTS
5 crédits
Composante
UFR Lettres, Art, Cinéma
Volume horaire
24h
Période de l'année
Semestre 2
Description
« Sons, rumeurs et bruits du monde : entre métaphysique, histoire et littérature »
Deux séances introductives (1, 2) dessineront des pistes pour saisir l’arrière-plan philosophique et théologique du bruit, ainsi que le sens politique de notions tels que vacarme, tapage ou brouhaha. Le cours abordera ensuite dans un ordre chronologique différentes thématiques du bruit dans des textes allant de la fin du XVIIIe jusqu’au XXIe siècle. On évoquera le bruit dans la poésie française du préromantisme jusqu’à Laforgue (3, 4), au moment où les écrivains commencent à porter un intérêt accru aux sonorités brutes, discordantes, qui émanent de la nature comme de la ville. Les textes consacrés aux Expositions universelles ou relatant des voyages et missions coloniales (5) permettront d’étudier la perception de la musique de l’autre comme bruit. Deux séances seront consacrées à la question de la représentation du son et des bruits dans un texte de fiction (6, 7), par opposition à celle des autres sens (vue, odorat, etc.), avec des exemples pris chez Balzac, Flaubert, Zola, Proust et Virginia Woolf. On abordera le XXe siècle en explorant les liens entre bruit, mutisme, violence politique et inhumain chez l’essayiste autrichien Hermann Broch et l'écrivain hongrois Imre Kertész, en terminant sur la « résonance du monde » que le sociologue Hartmut Rosa oppose aujourd'hui à « l'accélération du temps » (8, 9). Les dernières séances examineront la façon dont la poésie a pris en charge le bruit depuis le milieu du XXe siècle. On distinguera les poètes qui, comme Yves Bonnefoy, donnent au bruit une valeur d’absolu ontologique et poétique, et considèrent l’écoute des « bruits d’ici » comme une expérience originelle de l’« Un du monde » et de notre finitude avec laquelle l’écriture aurait pour tâche de renouer (10), et les poètes qui, à l’inverse, exploitent le bruit pour son potentiel de parasitage et de nuisance et refusent toute forme de domestication du bruit dans et par la poésie. C’est le cas notamment de Bernard Heidsieck, dont les diverses techniques de captation et d’intrusion des bruits dans le poème visent à « arracher le poème à la page » et à le « brancher sur le monde » (11). Le développement simultané de la poésie sonore et de la musique concrète au début des années 50 sera l’occasion de se concentrer, pour finir, sur le champ musical et d’observer comment les théoriciens (Russolo, Schaeffer, Henry) et les compositeurs (Cage, Varèse, Xenakis) ont interrogé la frontière entre bruit et musique, tantôt pour la bousculer, tantôt au contraire pour la reconduire, ou pour rétablir une forme de soumission en assimilant le bruit, sous prétexte de le libérer, à des « sons convenables » au même titre que les sons musicaux (12). Cette traversée permettra de mesurer la variété des implications axiologiques et politiques que revêt le bruit (tour à tour synonyme d’inarticulé, sale, plébéien, moderne, originel, etc.) dans la littérature et l’histoire des idées, et de montrer que sa revendication est le plus souvent liée à un geste de contestation ou de perturbation.
Heures d'enseignement
- Cours "Littératures du monde, études comparatistes 2"Cours Magistral24h
Syllabus
Eléments bibliographiques distribués à chaque séance.
Dernière mise à jour le 23 juin 2023