Cours "Théories et méthodes comparatistes 2"

« L'idée de monde et l'échelle du monde : quels enjeux? Littératures et arts, sciences humaines et philosophie »

Le cours se présente comme une enquête sur le monde comme espace et problème, échelle et idée. Au-delà de la notion chargée de « mondialisation », l’idée s’est imposée d’un « tournant global » des sciences humaines, chacune étant soumise à un changement d’échelle qui doit beaucoup au tournant postcolonial qui l’a précédé, et que les études décoloniales et écocritiques reformulent, dans un contexte souvent polémique. Que suppose ce tournant du point de vue de nos perceptions et représentations du "monde", et qu'en est-il de ce "nous" ? Peut-on tenter d'y voir clair dans ces appels au "décentrement" qui ne s'accordent pas toujours ? De quelles manières ce tournant se présente-t-il dans les divers domaines de la connaissance et de la création ? Comment affecte-t-il l’activité artistique et critique ? Pourquoi la vieille notion de cosmopolitisme suscite-t-elle d'aussi vifs débats ? Pourquoi revenir sur les plus anciennes cartographies et mesures du monde ? Pourquoi l’étude de la "littérature mondiale" ou "World literature" implique-t-elle de nouvelles formes de comparatisme? Au-delà des mutations de notre « condition cosmopolite » et de l'idée ou idéal de monde au cours des siècles - en Occident et hors Occident -, on réfléchira sur l’inquiétude que soulève l’existence même d’un « monde », et sur ses relations avec la "terre" et la vie. Face à un monde souvent perçu comme « abîmé », certains imaginent sa fin, d’autres entreprennent de l’« habiter poétiquement », d’autres de le « réparer » voire le sauver faute de le « transformer » (Marx). H. Arendt, qui a placé le "souci du monde" au centre de sa pensée politique, écrivait dans les années 1950 : « Les seuls à croire encore au monde sont les artistes. La persistance de l'œuvre d'art reflète le caractère persistant du monde. Ils ne peuvent se permettre d'être étrangers au monde." On interrogera ce propos en évoquant théories, œuvres littéraires et visuelles, mais aussi événements d'actualité susceptibles d'être réfléchis et discutés, en élaborant une sorte de "carnet de bord".

Eléments de bibliographie indicative :
- Pascale Casanova, La République mondiale des lettres, Paris, Seuil, 1999.
- Hannah Arendt, Qu’est-ce que la politique ?, Paris, Poche, 2011
- Gilles Deleuze, L’Image-Temps, Minuit, 1985.
- Michael Foessel. Après la fin du monde. Critique de la raison apocalyptique, Seuil, 2012.
- Achille Mbembe, Politiques de l’inimitié, La Découverte, 2016.
- Vivre dans un monde abîmé, Critique n° 860-861, janvier-février 2019.
- Richard Powers, L'arbre-monde (The Overstory) trad. S. Chauvin, 10/18, 2018.